Date : 23/09/2019 09:58
En prélude aux échanges qui s’ouvrent lundi prochain,
le Premier Ministre a reçu une délégation des patronats conduites par le
président Célestin Tawamba.
Au sortir des échanges à l’immeuble Etoile qui ont
duré environ une heure samedi dernier, Célestin Tawamba, qui conduisait la
délégation des patronats et autres syndicats d’employeurs, entouré d’autres
responsables comme le Président de Ecam, Protais Ayangma ou le président de
l’Apeccam, Alphonse Nafack, s’est voulu sobre mais précis : « En dehors
de rappeler à Monsieur le Premier Ministre les dégâts causés par cette crise,
nous lui avons humblement dit que pour avoir des chances de réussite de ce
dialogue, il faut que nous soyons habités d’humilité, qu’on taise nos egos dans
l’intérêt de la recherche de la paix. En acceptant les différences. »
Le contenu du document remis par le GICAM au Premier
Ministre n’a donc pas été dévoilé à la presse. Mais entre les lignes de sa
déclaration à la presse, on note bien que le président du GICAM est resté sur
la ligne du relai de l’espoir que les chefs d’entreprises placent en ce
dialogue et leur appel à tous les participants pour un sursaut patriotique pour
en faire, une marche décisive sur le chemin du retour à la paix, susceptible de
permettre aux entreprises de renouveler leur disponibilité et leur engagement à
jouer, plus que jamais leur rôle, en tant que creuset social, moteur de la
croissance et de la création d’emplois et garante de la cohésion sociale aussi
bien dans ces régions que sur le reste du territoire national.
Car parmi les grands perdants de cette crise qui dure
depuis trois ans, les entreprises pâtissent grandement du climat d’insécurité
et sont ciblées de manière parfois délibérée par certaines actions ou
manifestations de la crise, puisque certains acteurs de la crise se sont fixés
pour but de détruire l’économie des régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest.
Parmi les actions les plus néfastes, l’on relève encore : les opérations
« villes mortes », les intimidations, rackets, enlèvements et
assassinats des employés et responsables d’entreprises ; les attaques et
destructions ciblées des structures économiques ; les déplacements des
populations ; l’arrêt des chantiers investissements publics...
L’impact pour les entreprises, déjà rendu public l’an
dernier par le GICAM après une étude d’impact auprès de ses adhérents, et dont
la version actualisée sera rendue publique dans les prochains jours, est lourd
et se répercute au-delà des deux Régions concernées : les opérations
"Ghost town" et "Lock down" qui se sont intensifiées se
traduisent par des arrêts quasi-généralisés qui représentent l’équivalent de
30,6% des jours ouvrables depuis deux ans et demi ; environ 35% du
territoire de ces Régions n’est plus accessible pour les entreprises, y compris
celles de distribution ; des épisodes d’inflation et de pénuries de
certains produits sont régulièrement enregistrés ; la fermeture des
services sociaux (santé et éducation) et des administratifs privent les
entreprises des supports indispensables pour maintenir des employés dans
certaines zones.
La lourde ardoise pour les entreprises
Dans
l’étude d’impact rappelée plus haut, on relevait de manière spécifique, que certaines
filières étaient lourdement impactées : l’activité de transport se
retrouve particulièrement sinistrée suite aux incendies de plusieurs véhicules
et à l’insécurité sur les routes ; l’exploitation forestière est à
l’abandon, laissant sur le carreau plus de 200 emplois et causant un manque à
gagner de plus de 5,5 milliards FCFA par an depuis 2017 ; les entreprises
agro industrielles à capitaux publics (CDC et PAMOL) ont été particulièrement
et sont quasiment à l’agonie. La filière banane de la CDC, qui représentait 40%
des exportations de banane de notre pays, est à l’arrêt depuis septembre 2018,
mettant à mal l’équilibre logistique de l’ensemble de la filière ; la
production cacaoyère commercialisée au Sud-Ouest est en baisse de 22% ;
représentant une perte en rentrée de devises de l’ordre de 55 milliards F CFA
et un manque à gagner de l’ordre de 35 milliards de FCFA de revenus pour les
planteurs ; en raison des destructions des équipements des opérateurs de
télécommunications, le service internet ne peut plus être assuré sur plus de
40% de ces Régions.
Bien
plus, au-delà du Sud-Ouest et du Nord-Ouest, 86% des chefs d’entreprises indiquaient
que la crise dans ces régions a des répercussions négatives sur leurs
activités. Pour survivre et préserver un minimum de présence et d’activités
dans le Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les acteurs économiques ont dû opérer des
ajustements difficiles ; conscients de ce qu’un abandon complet
aggraverait davantage une situation humanitaire et sociale déjà critique.
Le
GICAM a apprécié la portée des incitations instaurées par les décrets du
Premier ministre à travers le statut de zones économiquement sinistrées, que le
Groupement s’est déjà engagé à vulgariser auprès de ses adhérents pour un
retour des investissements dans les deux Régions. Mais le GICAM estime que cette démarche mérite aujourd’hui d’être
accompagnée dans une approche holistique.
Cela pourrait se faire d’une part à travers le soutien aux unités opérationnelles dans ces
Régions : facilités de financement pour réparer les préjudices
subis et remettre en fonctionnement les équipements ; accès prioritaire lors
des opérations de remboursement de crédits de TVA et de dettes intérieures ; périodes
moratoires spécifiques pour certaines obligations fiscales ; meilleure
considération de la part des autorités locales.
D’autre part, par le relèvement économique post crise des deux Régions. Car, pour compléter
la démarche impulsée par la reconnaissance du statut de zone économique
sinistrée, une stratégie globale pour le relèvement économique des Régions du
Nord-Ouest et du Sud-Ouest pourrait inclure, entre autres : l’apurement du
passif fiscal créé par la crise ; la remise à niveau des infrastructures
et équipements détruits, y compris par des subventions aux entités privées
touchées ; le subventionnement des mastodontes agro industrielles
installées dans ces zones et particulièrement sinistrées (CDC, PAMOL, …) ;
l’octroi des appuis spécifiques aux producteurs agricoles pour reconstituer le
matériel végétal et relancer les productions vivrières…