Le MINEFOP rencontre les Entreprises au GICAMPrélèvement de frais de visas sur les contrats des travailleurs étrangers

Prélèvement de frais de visas sur les contrats des travailleurs étrangers

Les locaux du GICAM à Douala ont servi de cadre, ce lundi 20 novembre 2023, à une importante concertation entre les Entreprises et le Ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle (MINEFOP). Le Ministre, Monsieur Issa Tchiroma Bakary, était accompagné pour la circonstance, des principaux cadres de son département ministériel et des autorités administratives au rang desquelles le Gouverneur de la Région du Littoral, Monsieur Samuel Dieudonné Ivaha Diboua, et le Préfet du Département du Wouri, Monsieur Benjamin Mboutou.

L’objectif de cette concertation était d’établir un dialogue franc entre les Entreprises et le MINEFOP au sujet des difficultés d’application des dispositions de l’article 22e de la Loi de Finances 2023, relatives aux recettes issues de l’apposition du visa sur les contrats des travailleurs de nationalité étrangère. Ces dispositions instituent en effet des frais de visa de travail équivalents à 2 mois de salaire et traitement brut pour les travailleurs non africains, et 1 mois de salaire et traitement brut pour les travailleurs africains, avec abattement de 50%.


Allocution du Président du GICAM

Dans son allocution de circonstance, le Président du GICAM, Monsieur Célestin Tawamba, a commencé par remercier le MINEFOP d’avoir accepté spontanément cette rencontre avec les Entreprises. Il a ensuite salué le combat sans relâche du MINEFOP pour redonner à la formation professionnelle toute sa valeur, dans un contexte où elle est encore généralement perçue comme la bouée de secours des jeunes camerounais en échec scolaire.

Poursuivant son propos, le Président du GICAM a tenu à souligner que les Entreprises ne remettent pas en cause cette nouvelle taxation dans son principe, la promotion de la formation professionnelle de la main d’œuvre camerounaise étant en soi louable.  Toutefois, il a relevé l’existence d’importantes difficultés d’application de cette disposition, qui sont de nature à dévoyer l’objet visé et avoir un effet répulsif sur les investisseurs. Il a enfin souligné, pour le déplorer, que ces difficultés d’application auraient pu être levées en amont s’il y avait eu une concertation avec les Entreprises préalablement à l’adoption de cette disposition.


Présentation de la problématique par la Directrice Exécutive du GICAM

A la suite du Président du GICAM, Madame Aline Valérie Mbono, Directrice Exécutive, a présenté les difficultés pratiques rencontrées par les Entreprises dans l’application de cette disposition.

Elle a premièrement présenté un benchmarking avec d’autres pays d’Afrique et d’Europe pratiquant le même prélèvement (Côte d’Ivoire, Bénin, Burkina Faso, France), qui révèle que le Cameroun applique des conditions plus rigoureuses tant en ce qui concerne le montant des frais de visa, qu’au regard de la base de calcul de ces frais. Elle a ensuite déroulé les principales problématiques posées par cette taxe, qui ont été résumées dans les points ci-après :

  • Interprétation subjective de l’assiette des frais de visa par les agents du MINEFOP, qui intègrent des éléments non prévus par la loi dans la base de calcul ;
  • Frais de visa ne tenant pas compte des contrats de très court terme (moins de 6 mois). Les Entreprises déboursent par conséquent le même montant quelle que soit la durée du contrat, ce qui remet en cause le caractère équitable de ce prélèvement ;
  • Modalités de paiement contraires aux dispositions légales et réglementaires régissant la collecte des ressources publiques, et notamment le principe d’unité de compte du Trésor. En pratique, les paiements sont effectués en espèce auprès des services du MINEFOP ou via la CAMPOST, ce qui est contraire aux textes en vigueur ;
  • Délai de traitement des dossiers anormalement long (4 mois en moyenne), allant parfois jusqu’à la paralysie totale de l’Entreprise lorsque le travailleur étranger est un mandataire social, et ne peut plus validement signer des documents ou engager l’Entreprise en l’absence du visa de son contrat de travail ;
  • Aucun remboursement n’est envisagé ni aucune compensation possible dans le cas de l’annulation, par le travailleur, d’un contrat dont les frais de visa ont été réglés ;
  • Distorsions de concurrence : Les Entreprises qui emploient régulièrement les travailleurs étrangers et s’acquittent des frais de visa subissent la concurrence des entreprises qui ne se conforment pas aux dispositions légales sur l’emploi de la main d’œuvre étrangère ;
  • Absence d’exemptions en faveur des Entreprises qui réalisent déjà des investissements importants dans la formation professionnelle de la main d’œuvre camerounaise.

Après l’énoncé des principales problématiques rencontrées par les Entreprises dans leurs démarches de conformité à l’article 22e de la LF 2023, la Directrice Exécutive du GICAM a formulé les propositions à l’endroit du MINEFOP, articulées autour des points ci-après :

  • Création d’un Groupe de Travail impliquant les services du MINEFOP, du MINFI, les Entreprises et le GICAM, à l’effet de discuter et formuler des modifications dans l’assiette, le calcul et les modalités de collecte des frais de visa.
  • Modification de la Circulaire du MINEFOP du 06 janvier 2023 précisant les modalités d’application de l’article 22e de la Loi de Finances 2023 en la remplaçant, si possible, par un Arrêté qui définirait toute les implications de la mise en œuvre de ces dispositions.
  • Actions de communication et de formation à mener à l’attention des Entreprises sur l’utilisation de la plateforme « Tresor Pay », développée par les services du MINFI pour assurer une collecte simplifiée et sécurisée des recettes non fiscales (incluant les recettes issues des visas des contrats des travailleurs étrangers).


Intervention du MINEFOP

Après avoir remercié le Président du GICAM de l’invitation à lui adressée, Monsieur le Ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle a, dans son allocution, apporté des projets de réponses aux problématiques soulevées par les Entreprises. Il a ainsi souligné que :

  • Les bases de calcul des frais de visa tels que prévus par la LF 2023 et les textes d’application du Code du travail sont appliquées de manière stricte par les agents du MINEFOP, qui ne détermineraient donc pas le montant des frais de visa de manière subjective.
  • Les travailleurs étrangers exerçant au Cameroun pour une durée inférieure à 6 mois sont considérés comme travailleurs en mission et n’ont pas besoin de contrat de travail visé.
  • S’agissant des délais de traitement des dossiers de demande de visa, le MINEFOP a indiqué avoir prescrit à ses équipes un délai de 72 heures, et a invité les Entreprises à dénoncer auprès de lui tous les retards observés.
  • Une fois le visa délivré, le MINEFOP n’est pas responsable des difficultés pouvant survenir entre l’Entreprise et le travailleur étranger aboutissant à l’échec de la relation de travail initialement prévue, justifiant ainsi qu’il n’y ait pas de remboursement ou de compensation au profit des Entreprise dans ces cas.
  • S’agissant du caractère élevé des frais de visa, il a tenu à rappeler que si les montants sont inférieurs à la plupart des pays, ces derniers appliquent ces dispositions depuis de nombreuses années au contraire du Cameroun.


Echanges

L’intervention du MINEFOP a donné lieu à une phase de question-réponse, au cours de laquelle les Entreprises ont présenté les difficultés pratiques auxquelles elles font face dans le cadre de la mise en œuvre de ces dispositions. Le MINEFOP a indiqué que ces préoccupations seront diligemment examinées dans le cadre du groupe de travail qui sera mis en place pour clarifier les modalités de mise en application des dispositions de l’article 22e de la LF 2023.


Résolutions

A l’issue des échanges, des résolutions ont été prises pour assurer un traitement diligent des problématiques relevées. Il s’agit :

  • De la mise en place imminente d’une commission ou groupe de travail, qui réunira les services du MINEFOP, du MINFI, des autres administrations concernées et le GICAM, à l’effet de discuter des modalités de mise en œuvre sereine des dispositions de l’article 22e de la LF 2023.
  • Du développement d’un fichier des travailleurs de nationalité étrangère de concert avec les services de la Police et du Ministère de Relations Extérieures, afin de traquer les travailleurs étrangers qui se dérobent aux dispositions légales encadrant l’entrée, le séjour et l’exercice d’une profession au Cameroun. 
  • Le développement d’un référentiel de grille de salaire de base des travailleurs étrangers au Cameroun, afin de mieux évaluer, budgétiser et sécuriser la collecte des frais de visa. A ce sujet, les services du MINEFOP ont indiqué avoir déjà l’autorisation de la hiérarchie pour le recrutement d’un consultant qui mènera ces travaux.

Les travaux ont été clôturés par les mots de Monsieur le Ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, qui a une fois de plus salué l’organisation de cette rencontre, qui s’inscrit dans la volonté du GICAM de participer aux côtés du MINEFOP à la montée en capacité de la ressource humaine camerounaise. 

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